lundi 20 octobre 2008

Vu et entendu...

Méli-mélo d’expressions, de phrases ou d’anecdotes plus ou moins insolites, glanées au gré de mes pérégrinations…

EXPRESSIONS LOCALES

« Avoir un ventre missionnaire », c’est accepter de manger ce qu’on te propose quand on te le propose , sans faire le difficile.
« Avoir des yeux congolais », c’est avoir le regard perçant du chat dans la nuit, qui permet de distinguer des formes (mêmes lointaines) dans l’obscurité la plus totale.
« Avoir des oreilles congolaises », c’est posséder l’ouïe fine du chien, qui perçoit le moindre bruit, bien avant que nous l’entendions réellement.

DECALAGES CULTURELS

Signe particulier : nez …
Pour de nombreux policiers ou agents de l’administration, notre nez est un « signe particulier » ( rubrique figurant en bas de page dans de nombreux formulaires « officiels »), et ils le disent « aquilin », c'est-à-dire recourbé en bec d’aigle…, ce qui est très souvent faux !
En tous cas, ici tout le monde (petits et grands) croit que nous avons un nez fin parce que quand nous sommes bébés, notre maman nous le pince !! C’est drôle, non ?!

L’accueil en Occident , vu par les Africains
« Est-ce que c’est vrai que quand quelqu’un arrive chez vous, « sans être prévu au programme », à l’heure de manger par exemple, soit vous le laissez repartir après quelques brefs échanges, soit vous l’invitez à partager votre repas, mais en glissant discrètement la facture sous son assiette ?? »
Question de François, mon collègue congolais, qui veut en avoir le cœur net à propos d’une croyance largement répandue ici...
Je vous laisse imaginer notre réaction de mundélé (blanches)… Nous l’avons bien sûr rassuré, en pouffant de rire !!!

« Désolée messieurs, mais je ne suis pas à vendre !! »
Echanges entre des étudiants (la cinquantaine) du cours d’Anglais auquel j’assiste, pendant que je discute avec le prof .
Après renseignements auprès de François (« où habite-t-elle ? est-ce qu’elle est célibataire ? »), l’un dit à son voisin, ignorant la réponse de François :
- « mais toi tu peux te marier avec elle, tu as beaucoup d’argent !
- mais je n’ai pas besoin d’une autre femme, j’en ai déjà une, et ça se passe très bien !! »
Juste pour vous dire qu’ici ce dialogue n’a rien de surréaliste : les femmes, régulièrement considérés comme du bétail, n’ont pas vraiment leur mot à dire sur le choix du mari. Seul le montant de la dot importe… Je suis bien contente d’être née en France !!

REPORTAGE DU MOIS : LA SITUATION DE L’EDUCATION

« Le laboratoire »… ou comment réussir son Bac sans travailler…
Ici, il n’est pas rare que les candidats paient des profs pour répondre à leur place le jour de l’examen: ils écrivent les questions sur un bout de papier, le jettent par la fenêtre (au vu et au su de tout le monde), et attendent la réponse…Ils appellent ça « le laboratoire »…

Bon courage !
Constat : un étudiant qui obtient de trop bons résultats est presque systématiquement recalé par le jury, celui considérant qu’il a sans aucun doute payé un prof pour rédiger sa copie… comme si c’était inconcevable qu’un étudiant ait réellement travaillé pour préparer son examen, ou qu’il soit brillant !
Ca fait peur, mais on comprend mieux pourquoi le niveau des élèves est catastrophique !! D’autant plus que ça commence dès la maternelle, les maîtresses s’endormant sur leur natte ou leur bureau (au lieu de s’occuper des enfants), pour que la classe passe plus vite !!
Il faut préciser que n’étant pas payées (par l’Etat ni personne), elles sont obligées de travailler au champ pour nourrir leur famille, ce qui peut expliquer leur fatigue ou leur manque de motivation…

Relativité de certaines notions…
Un jour en rentrant de l’école, Kévy (5ans) nous raconte qu’il a passé la matinée enfermé dans la classe avec tous ses petits camarades…
Après quelques explications, nous apprenons que la maîtresse est partie accompagner un enfant malade à l’hôpital, et a enfermé les 59 autres (nombre habituel d’enfants par classe) pour qu’ils restent bien au chaud pendant son absence… Vous y croyez vous ???
Il faut bien se rendre à l’évidence, certaines notions, telles que « responsabilité éducative » et « gestion de groupe », sont toutes relatives !!!


LA PHRASE DU JOUR

« L’humilité est une vertu que doit posséder tout bon chrétien…, et ça consiste à faire tout ce que je vous demande ! »
Précision : parole émanant d’une des plus hautes autorités locales (Eglise catholique), et qui ne m’était pas destinée… Heureusement, car je n’aurai sans doute pas pu m’empêcher de réagir ! Et pour vous, c’est quoi l’humilité ??

CHERCHER L’INTRUS

Parmi ces objets, lequel ne sert jamais pendant la messe ?
Calice- - ciboire- balai pour chiottes (excusez ma trivialité)- encensoir- goupillon- aube.
Je suis sûre que vous avez tous pensé « ben, balai pour chiottes ! » Détrompez-vous, ici cet objet est essentiel, puisqu’il permet de jeter une grande quantité d’eau (ils appellent ça « bénir ») sur un grand nombre de fidèles ! Et il est de préférence choisi en plastique et multicolore (poils), afin de respecter la sobriété habituelle des cérémonies religieuses…

PETITES ANNONCES

« Cherche veuve désespérément… »
Je vous sollicite ici de la part de ma sentinelle, Papa Denis (il garde les environs de mon logement entre 20h et 21h30, toute la nuit en théorie, c'est-à-dire dans le contrat qu’il n’a jamais signé…), qui aimerait communiquer avec une Française (de préférence aisée et disponible) intéressée par « les échanges interculturels » (comprendre l’aide à distance). Il a déjà plusieurs femmes et de nombreux enfants à nourrir… Je compte sur votre altruisme et votre bon cœur, merci d’avance pour lui !

A bon entendeur, salut !
J’espère que cette rubrique « vu et entendu » vous a plu. D’autres suivront s’il y a matière, je n’en doute pas !

Tokomonana ! (A bientôt !)

Nanou de Basankusu.

vendredi 10 octobre 2008

Bienvenus au paradis...

« Mboté nabino ! » (Bonjour à tous, en lingala)

Me voici en Afrique depuis un peu plus d’un mois, et déjà beaucoup de choses à dire...
Après 3 jours passés à Kinshasa, la capitale oppressante, j’ai rejoint un petit coin de paradis, où tout pousse avec une rapidité déconcertante, surtout en ce moment où nous connaissons une alternance de soleil et de pluie.
Pour imaginer un instant mon environnement quotidien, calez-vous dans un fauteuil confortable et fermez les yeux…Imaginer une nature luxuriante (beaucoup de vert), des maisons et des chemins couleur brique qui serpentent partout dans la forêt, le bleu du ciel et du fleuve, et enfin un grand soleil qui brille… Le décor est planté.
Essayer aussi d’imaginer un quotidien calé sur le lever et le coucher du soleil (6h-18h), et dépendant des travaux des champs : vous approchez de la vie des gens de Basankusu… La mienne est moins rude (j’ai un toit en dur, de l’eau courante, de l’électricité le soir, et l’assurance de manger au moins 3 fois par jour, sans être obligée de passer la journée à travailler mon champ sous un soleil harassant…) : en tant que « mundélé » (blanche), j’ai le droit à un traitement de faveur…
Côté relationnel, je commence à être capable d’échanger quelques mots et phrases en lingala (une des langues locales) avec les habitants, qui généralement me connaissent déjà, soit parce qu’ils m’ont croisé sur les chemins avec Juliette (l’autre directrice mundélé), soit parce qu’ils m’ont vu danser à la cathédrale (mon premier baptême du feu au rythme des tambours), soit parce qu’ils m’ont entendu chanter « Cadet Rousselle » ou « Le Petit Navire » dans un cours de Français ou dans un quartier… Bref, j’ai mes petites habitudes, j’ai déjà sympathisé avec quelques Congolais « authentiques » (grâce à Juliette), et je commence à me sentir un petit peu chez moi !
Côté faune animale, c’est beaucoup moins pire que ce que j’imaginais, ou alors je me suis déjà habituée à croiser rats, cafards, lézards, crapauds, fourmis, criquets, et autres insectes volants multicolores et inconnus chez nous… sans sursauter à la moindre apparition ! Les moustiques et les maringouins ont quand même bien apprécié mes pieds et mes chevilles, jusque là couverts de multiples boutons et piqûres. Ca commence seulement à se calmer, grâce à l’application de remèdes locaux (feuilles de papayer)…
Et oui, mon côté bio, écolo, et médecines douces trouve à s’exprimer : ici comme en France, j’essaie de sensibiliser par mes choix, en préférant par exemple la papaye ou la pâte d’arachide locales et 100% naturelles à la margarine, la mayonnaise, et au pseudo-nutella 100% transformées !
Mis à part la consommation régulière de bière (merci les colons belges!), de vin de palme ou de "aguéné" (eau de vie locale), les gens (ceux qui ont la chance de manger) ont une alimentation plutôt saine, issue des productions locales (manioc, maïs, viandes et poissons frais, chenilles, fruits, arachides...), bien que souvent répétitive (beaucoup d'enfants souffrent de malnutrition).
La nature leur offre aussi de multiples remèdes naturels et gratuits, mais peu s'y inytéressent... Dommage! J'ai quand même réussi à trouver quelques personnes capables de me renseigner sur les plantes guérisseuses... et ce ne sont pas des "ndoki" (sorciers), bien qu'ici les gens en voient partout, et c'est pas des blagues hein... on rigole pas avec la sorcellerie!!! Ceci fera sans doute l'objet d'un prochain article...
En attendant, je vous envoie quelques rayons du soleil qui brille généreusement ici, je sais qu'en France la chaleur n'est pas vraiment au rendez-vous...
Tokomonana! (A bientôt)